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DISCOURS DU PAPE PAUL VI
AUX REPRÉSENTANTS DE L'ASSOCIATION DE
LA PRESSE ETRANGÈRE EN ITALIE

Mercredi 24 janvier 1973

 

Chers Messieurs,

Nous vous remercions des paroles aimables et confiantes que vous venez de Nous adresser par la voix de votre Président. Vous avez voulu Nous associer au soixantième anniversaire de l’«Associazione della Stampa Estera in Italia», célébré en octobre dernier. Nous nous y prêtons bien volontiers, en tette fête de Saint François de Sales, le Saint patron des journalistes, qui a voulu mettre la vie spirituelle la plus authentique à la portée de tous les laïcs, comme vous vous efforcez de mettre l’actualité à la portée du grand public.

Vous êtes les bienvenus en cette maison où, voici vingt ans, notre prédécesseur Pie XII accueillait avec honneur les membres de votre Association. Le Pape Jean avait aussi adressé, en février 1963, à votre Conseil de direction, des paroles émouvantes, simples et nettes, jaillies de son cœur d’apôtre et de son expérience des hommes, tout empreintes de confiance. C’est sur ce ton de la conversation familière que Nous abordons cette rencontre, heureux, oui, très heureux, de pouvoir Nous entretenir avec vous de votre profession qui Nous a toujours tenu très à cœur.

Nous regardons d’abord avec une grande sympathie, imprégnée d’estime et de réalisme, la mission qu’il vous est donné d’assumer dans le monde moderne. C’est un fait, vous représentez une force immense dans notre civilisation. Aucune institution ne peut faire fi de l’opinion publique que vous contribuez singulièrement à former, avec les autres moyens de communication sociale. L’expérience confirme chaque jour davantage ces paroles que le regretté Père Emile Gabel écrivait il y a dix ans: «L’information . . . est le système nerveux de la vie moderne, par les réactions qu’elle déclenche et l’influx qu’elle propage à travers tout le corps social» (Etudes, t. 318, juillet-août 1963, p. 19).

Il Nous revient aussi à la mémoire cette pensée judicieuse de Blaise Pascal: «Je voudrais de bon cœur voir le livre italien, dont je ne connais que le titre, qui vaut lui seul bien des livres: "Della opinione regina del mondo". J’y souscris sans le connaître, sauf le mal, s’il y en a» (Pensées, éd. Brunschvicg, 82). La façon dont vous recueillez les faits, dont vous les groupez, les présentez, les interprétez, fournit à vos lecteurs une matière à réflexion et des critères de jugement dont l’écho et la résonance commune - c’est ainsi que Pie XII qualifiait l’opinion publique - prennent une place capitale qu’il serait superflu de décrire. C’est dire le rôle passionnant qui vous échoit, comme aussi la responsabilité considérable attachée à ce pouvoir.

Mais Nous pourrions dire également que votre métier comporte des exigences, et aussi des servitudes qui ne Nous échappent pas: elles mettent les journalistes consciencieux devant une tâche lourde, délicate et difficile.

La première exigence est celle de vous soumettre au réel, qu’il s’agisse de faits, de situations, de mentalités. Tous les faits ne sont certes pas des «événements», objets d’information. Mais il ne s’ensuit pas que leur choix, et à plus forte raison leur interprétation, soient laissés entièrement à votre liberté. Les lecteurs attendent de vous une documentation honnête, précise, aussi complète que possible, qui leur permettra de juger, en responsables. Quelle que soit l’initiative que vous avez à mettre en ouvre, il y a donc une certaine ascèse en face d’une réalité qui n’est pas une construction de l’esprit, et d’un public qui manifeste de justes exigences. En ce sens, vous n’apparaissez plus comme des maîtres, mais comme des serviteurs.

Par ailleurs, ce travail intéressant se révèle par lui-même très astreignant, à cause du foisonnement continuel de l’actualité. Il ne vous laisse guère de repos, car vous devez être prêts à accueillir quotidiennement l’événement. Bien plus, il vous faut faire vite pour saisir les informations à leur meilleure source, rassembler les antécédents qui les situent, décrire le contexte, rédiger d’une plume alerte, dans un article condensé, que les responsables de la mise en pages risquent de réduire à leur tour. Nous avons bien conscience de ces difficultés.

Il y a enfin et surtout les servitudes de la presse pour laquelle vous travaillez, et les goûts des lecteurs dont on cherche à capter l’intérêt, ne serait-ce que pour faciliter la vente. Cela met à rude épreuve le souci d’objectivité, disons d’indépendance, qui constitue à nos yeux l’honneur du journalisme. Il vous faut d’abord résister à la tentation du sensationnel à tout prix, qui entraîne à devancer l’actualité, à simplifier ou à déformer la réalité, voire à s’appesantir sur ses aspects les moins nobles: une telle presse se déshonore elle-même. Il existe aussi bien d’autres conditionnements, plus insidieux, qui peuvent s’exercer sur vous, d’ordre économique, politique, idéologique, ou issus de groupes de pression dont l’opinion semble faire la loi du jour et que l’on n’ose pas contrecarrer. Il y a tout simplement la concurrence implacable, qui peut vous inciter à publier vous aussi des éléments discutables dont on vous reprocherait de ne pas avoir parlé, ou à faire le silence sur des points importants qui ne passionnent malheureusement pas l’opinion publique. Toutes ces conditions actuelles des communications sociales ne font que souligner la conscience et le courage que requiert votre profession, et peut-être aussi la solidarité qu’elles vous appellent à mettre en œuvre, avec vos collègues, dans votre milieu, pour assainir toujours davantage les mœurs journalistiques et vous assurer l’indépendance nécessaire à l’objectivité.

Toutes ces difficultés existent: néanmoins les impératifs de la «déontologie» de la presse demeurent. Ils impliquent amour incorruptible de la vérité, recherche laborieuse, droiture, humilité, aptitude au dialogue. Il ne s’agit pas d’une morale négative, faite d’interdits, qui risquerait effectivement de vous décourager. Il s’agit de répondre à ce droit de tout être humain à une information objective, comme le proclamait Jean XXIII dans «Pacem in terris»; de lui permettre ainsi de savoir, de comprendre, de se cultiver, de mieux prendre en main son destin et de participer à la construction de la cité, en responsable éclairé. Cet objectif suppose un sain pluralisme de la presse, qui permet une confrontation des points de vue, une communication, un dialogue ouvert avec les lecteurs, à la recherche d’une plus grande vérité et d’un plus grand bien. Dans ce concert, vous avez pleinement le droit d’exprimer vos idées et de défendre vos préférences, mais jamais au détriment d’une information objective ni d’un jugement équitable. Ce serait une responsabilité redoutable que de répandre une conception tronquée de la réalité, qu’il s’agisse des institutions ou des personnes. Votre rôle est de susciter une formation pleinement humaine, d’être des éveilleurs, grâce à l’instrument de choix dont vous disposez. C’est dire l’honneur que Nous accordons à votre profession, l’estimant toujours capable d’un meilleur service des hommes.

Dans l’Eglise également, cette importance de la presse a fait l’objet d’une réflexion mûrie, notamment depuis le Concile Vatican II, et de dispositions appréciables. Les moyens de communication sociale y ont été envisagés dans leur signification la plus positive, en dépit de leurs imperfections et de leurs risques. Le droit à l’information, qui y a été proclamé et précisé, trouve son application dans l’Eglise elle-même: en même temps qu’une institution hiérarchique agissant au nom du Christ, n’est-elle pas aussi une communauté humaine, avec la nécessité du dialogue et de la participation?

Comme témoin typique de cet effort, notre Commission pontificale a publié l’Instruction pastorale «Communion et progrès»: Nous vous invitons à la méditer de nouveau et Nous sommes heureux de l’offrir en hommage à chacun d’entre vous. Témoins aussi ces initiatives que le Saint-Siège a peu à peu mis en œuvre au Vatican, et que vous avez eu la courtoisie d’évoquer: la salle de presse, près de laquelle la plupart d’entre vous sont accrédités et qui demeure en permanence à votre disposition; les nombreuses conférences de presse qui ponctuent la parution des documents pontificaux; la distribution aussi de ces textes et de leur traduction, avec embargo quand c’est possible. Vous avez reçu progressivement une information plus complète au cours du Concile, des divers Synodes d’évêques; la salle du Synode a connu récemment des débats de qualité sur la justice et la paix . . . Il demeure évidemment des limites que la discrétion et le bien commun exigent, dans l’Eglise, plus encore que dans les autres sociétés. La raison en est simple. Si l’Eglise doit bien connaître le monde auquel sa pastorale est destinée et susciter une large collaboration de ses fils, ses décisions prennent leur appui dans l’Evangile et dans sa propre Tradition vivante, non dans l’esprit du monde, ni dans l’opinion publique, à laquelle échappe souvent d’ailleurs la complexité des problèmes théologiques ou pastoraux qui sont en cause. Mais nous ne prétendons pas pour autant, en ce qui concerne le Saint-Siège, avoir réalisé tout ce qui serait possible et souhaitable pour faciliter votre travail. De toute façon c’est dans un climat de respect, de confiance, de sincère collaboration que pourront s’accomplir de nouveaux progrès.

Et maintenant, Nous n’oublions pas que vous êtes journalistes, en quête de nouvelles, d’interviews, au cours de toutes vos rencontres, y compris de celle-ci. Et vous êtes vous-mêmes porteurs de questions, des vôtres, de celles de nos contemporains, dans le désir de contribuer à établir comme «un pont» entre l’Eglise et l’humanité. Le monde attend effectivement de Nous des réponses à sa recherche, à son inquiétude, à son espérance. Nous nous efforçons de le faire dans les actes habituels de notre ministère. Nous regrettons toutefois que, trop souvent, un seul aspect de nos paroles soit mis en relief. Ce matin, Nous nous contentons d’attirer votre attention sur quelques-unes des lignes maîtresses de notre pontificat, en faisant appel à votre collaboration.

Sur le plan de l’Eglise, dont il Nous revient de confirmer la foi et de garantir l’unité, Nous veillons à appliquer fermement et intégralement le Concile Vatican II, à marcher sur les chemins qu’il a ouverts. Nous tenons à le faire dans l’esprit de notre première encyclique «Ecclesiam suam». A ce sujet, Nous voudrions vous dire un mot des multiples actes pontificaux, législatifs et pastoraux, qui ont jalonné ces dernières années. Mesurez-vous à quel point ils sont longuement préparés, dans leur ensemble, par une intense collaboration avec les représentants de tous nos Frères dans l’épiscopat? Si leur préparation requiert de nous, Pasteurs, une étude théologique exigeante, leur présentation au grand public, qui se fait en partie par votre intermédiaire, vous demande aussi, à vous journalistes, une réflexion sérieuse en ce domaine.

Vous êtes témoins aussi des troubles qui agitent l’Eglise. Les réformes qui suivent un grand Concile nécessitent toujours un ajustement laborieux, et plus encore l’adaptation rapide aux mutations accélérées de notre époque. Mais ces conjonctures n’expliquent pas; toute la profondeur des remises en question. Comme Pape, Nous en mesurons la gravité, et Nous devons, tel un veilleur, en signaler l’ambiguïté humaine, voire l’ivraie que le Malin sème dans la Royaume de Dieu. Au milieu de tant de phénomènes marginaux et contestataires, qui sont une proie facile pour le journalisme, comment ne pas souhaiter que vous sachiez discerner, vous aussi, ce qui peut être recherche loyale d’une attitude évangélique, et ce qui porte déjà la marque d’une aventure stérile, coupée de ses racines vivifiantes? Souvent le bien ne fait pas autant de bruit!

Précisément Nous ne cessons de relever ce qui manifeste un réveil authentique, un progrès dans la prière, dans l’engagement de charité, dans la participation active a l’œuvre de l’Eglise. Ces signes sont nombreux, même s’ils sont discrets: ne pourraient-ils pas faire davantage l’objet de votre regard attentif, de votre témoignage? Le journaliste, surtout le journaliste chrétien, doit, comme le théologien, avoir les yeux grands ouverts sur la chrétienté en travail (Cfr. M. D. CHENU O. P., dans La Parole de Dieu, II, L’évangile dans le temps, Cerf, 1964, pp. 212-224). La véritable Eglise s’enfante aujourd’hui dans la fidélité et la hardiesse de l’Esprit, dans l’unité du Corps du Christ. Nous ne vous demandons pas d’en faire a priori l’apologie, mais d’accorder vraiment la place que méritent ces faits positifs. Comme le Seigneur, Nous vous disons: venez et voyez (Cfr. Io. 1, 39).

Sans doute le mystère de l’Eglise sera-t-il toujours difficile à saisir pour ceux qui sont chargés, comme vous, d’en relever les aspects phénoménologiques. L’Eglise est faite d’hommes, de relations sociales. Le Saint-Siège lui-même utilise un appareil extérieur dont l’opinion publique a tendance à ne voir que les détails insignifiants. Vous connaissez les «lieux communs» qui circulent sur le Vatican et qui donnent une image insolite et fausse de la réalité, sans laisser bien souvent la possibilité pratique de faire les rectifications nécessaires. Peut-être êtes-vous plus sensibles encore à la tentation subtile de ne chercher, dans les actes du Saint-Siège, que la portée ou même les intentions «politiques». Mais Nous vous estimons capables de vous élever au-dessus de ces visions partielles ou déformées. La loyauté demande qu’on interroge l’Eglise sur ce qu’elle dit d’elle-même, sur ce qu’elle est en réalité: une institution dont les mobiles ne sont pas politiques, mais spirituels, dont les racines sont évangéliques, dont la visée est eschatologique. En hommes de bonne volonté, sachez en découvrir le cœur, et le manifester à vos lecteurs, comme l’exigent la vérité et l’objectivité. Nous faisons particulièrement appel à ceux qui, parmi vous, partagent la foi chrétienne: comment pourraient-ils parler de l’Eglise, comme d’une réalité extérieure, alors qu’elle est pour eux aussi une mère? Ne serait-ce pas la meilleure chance pour eux de la comprendre de façon adéquate? On ne connaît bien qu’avec le cœur.

En dehors de la vie interne de l’Eglise, vous êtes témoins encore de nos préoccupations pour tout ce qui touche l’existence de nos contemporains : les droits de l’homme, la famille, la culture, les problèmes économiques et sociaux, la construction de la communauté internationale. C’est vrai: il n’est pas de domaine humain qui ne rencontre notre sollicitude. La Constitution «Gaudium et Spes» vous donne le secret de notre intérêt, de notre solidarité avec les espoirs ou les angoisses des hommes de notre temps. Dans tous ces secteurs les chrétiens ont un service à accomplir avec tous les autres hommes, sans perdre de vue l’achèvement dans le Royaume du Ciel; ils s’y engagent avec l’urgence de la charité. Notre vision peut vous apparaître bien optimiste: elle l’est en effet. Nous sommes sûrs que Dieu a sauvé le monde et promis aux hommes son Esprit. Puissiez-vous donner largement écho à notre espérance! C’est d’elle que les hommes ont besoin pour entreprendre et pour bâtir un monde meilleur. Un acte d’amour généreux est un événement plus important qu’un acte de haine. Il dépend de vous aussi que l’humanité ne soit pas assombrie, mais éclairée, stimulée par la vision qu’elle puise dans vos journaux.

Quant à la paix elle-même, vous connaissez nos convictions, sans cesse reprises dans nos exhortations. Si la solution pratique des conflits échappe à notre compétence, nous voulons du moins exercer ce ministère de réconciliation dont le Seigneur nous a chargé, c’est-à-dire renverser sans cesse ce mur d’indifférence et de haine que le Christ est venu détruire en son principe (Cfr. Eph. 2, 14). Et quand nous parlons de paix, nous ne la séparons jamais de la justice. Nous vous remercions de l’écho que vous y donnez.

Faut-il formuler un dernier souhait? Nous vous invitons tout à l’heure à échapper à une certaine conspiration du silence qui se fait autour de problèmes, vitaux pour l’humanité comme pour l’Eglise. Il est en effet des catégories entières de gens qu’on pourrait appeler les «laissés-pour-compte de l’information», qui ne créent pas aujourd’hui de problèmes politiques sur le plan international, mais qui sont oubliés dans leur misère, lésés dans leur dignité humaine, dans leurs droits humains élémentaires, dans leur liberté, dans leurs exigences spirituelles. L’esclavage n’est pas aboli autant qu’on le croit et les prisonniers dits politiques ont rarement été si nombreux. Vous nous permettrez d’évoquer des situations qui nous tiennent particulièrement à cœur: le sort injuste et douloureux fait à l’Eglise en certains pays. Prend-on suffisamment au sérieux la souffrance de ceux qui en sont victimes, qui ne peuvent y exprimer librement leur foi ni disposer des moyens normaux de la transmettre à leurs enfants? Puisque vous Nous demandez nos préoccupations, celle-là demeure essentielle.

Voilà, chers amis, quelques confidences amicales que nous soumettons à votre réflexion. Elles vous manifestent notre estime et notre confiance. Nous sommes prêts à vous aider dans votre tâche difficile et prions l’Esprit-Saint de vous assister. Puissiez-vous à votre tour faire connaître le vrai visage du Saint-Siège, de l’Eglise, travailler de concert avec Nous pour les grandes causes de l’humanité, pour la paix. Nous saluons en vous chacun des pays dont vous représentez la presse en Italie. Nous formons les meilleurs vœux pour vous-mêmes comme pour vos familles, et Nous invoquons sur vous tous, avec le patronage de saint François de Sales, les Bénédictions de Celui qui nous a apporté l’Evangile, la Bonne Nouvelle.

* * *

Nous venons d’entendre comme vous, cette nuit, l’annonce officielle de la conclusion de l’accord pour la paix au Vietnam, fait simultanément par le Président des Etats-Unis, le Gouvernement de Hanoï et celui de Saigon.

Nous sommes avec tous ceux que cette nouvelle remplit de joie! Et Nous ne voulons pas tarder davantage à envoyer nos félicitations et nos vœux de paix, de liberté, de concorde et de prospérité, tant aux populations du Sud-Vietnam qu’à celles du Nord-Vietnam.

Nous voulons dire notre satisfaction à tous ceux qui ont eu le mérite de vouloir mettre fin à ce conflit interminable et meurtrier. Nous leur répéterons les paroles de l’Evangile: Heureux les artisans de paix, car ils mériteront d’être appelés fils de Dieu! (Cfr. Matth. 5, 9)

Mais Nous nous sentons particulièrement proche de tous ceux qui ont souffert - ô combien - à cause de la guerre. Où sont, chers Vietnamiens, où sont vos morts? Et combien sont-ils? Le Dieu des vivants et Père de tous ne les oubliera pas, et Nous le prierons de les accueillir en son sein pour la vie éternelle. Mais Nous pensons actuellement aux veuves, aux jeunes orphelins, aux enfants sans maison, sans famille, sans assistance; aux blessés, aux mutilés, aux réfugiés, aux pauvres, et Nous faisons appel aux personnes de bonne volonté comme aux institutions de bienfaisance pour qu’elles apportent leurs secours à tous ces gens qui sont dans l’affliction et dans le besoin: plus que jamais, il faut aider le Vietnam! Après une épreuve aussi longue et aussi tragique, il importe qu’il se relève rapidement et qu’on lui fournisse une aide prompte et efficace. Il s’agit non seulement de réconforter ce peuple et de rebâtir les ruines, mais aussi de restaurer chez tous les citoyens du monde le sens du bien, de la solidarité humaine, de la liberté, de l’ordre et de l’espérance.

Riz, vêtements, médicaments, habitations, écoles, routes, travail, églises: rien de ce qui est nécessaire à une société ordonnée ne doit manquer à cette terre tourmentée. Nous dirons même plus: les mœurs pacifiques et l’expression artistique qui caractérisent traditionnellement le génie de ce peuple doivent refleurir. Tel est le souhait que Nous formons; et, pour notre part, Nous continuerons à faire tout notre possible pour que cette rénovation s’accomplisse, depuis l’armistice jusqu’à l’établissement de la paix.

L’armistice est une trêve des armes: il faut qu’elle évolue et se transforme en véritable paix.

Oui. Ecoutez notre voix humble et cordiale, chers Vietnamiens, et vous tous qui prenez intérêt à la fin de ce conflit. C’est dans les cœurs que la véritable paix trouve sa source; ce n’est pas dans la victoire des armes, ni dans la domination politique, ni dans l’orgueil de race, ni même dans l’équilibre des forces et des intérêts; la véritable paix est fondée sur l’amour, sur le fait que nous sommes frères. Le grand effort à réaliser maintenant est donc celui de faire renaître l’amour, la confiance, la sympathie, la patience dans les esprits exacerbés. Chacun doit recréer la paix en lui-même pour pouvoir la rétablir avec les autres. C’est là une vérité paradoxale: pas de vengeance, mais le pardon réciproque. Cette vérité, c’est Jésus, le Christ, qui nous l’a enseignée: quant à Nous, Nous vous la transmettons, pour votre bonheur, pour votre paix. Et en vous saluant cordialement, Nous vous bénissons.

                                            



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